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The Centre for Studies on Human Stress (CSHS) is dedicated to improving the physical and mental health of Canadians by empowering individuals with scientifically grounded information on the effects of stress on the brain and body.
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L’autre soir, après avoir fait ma crise de bassinette parce que j’avais perdu au scrabble (en passant, j’ai finalement gagné avant-hier !  …. mais perdu à nouveau hier … :)), je suis allée prendre une longue douche pour m’isoler un peu et permettre à mes hormones de stress de diminuer.

 

J’ai fait cela parce que je sais très bien — pour l’avoir étudié pendant près de 20 ans — que lorsque les hormones de stress atteignent le cerveau après avoir été produites par le corps, elles ont la capacité de modifier la manière dont on interprète les situations.  Cette réponse je vous l’ai déjà dit, est d’abord produite pour assurer notre survie.

 

Pour mieux saisir ce concept, je dois d’abord vous aider à distinguer le stress absolu et le stress relatif.

 

Le stress absolu fait référence à une menace réelle à la survie. Lorsqu’on fait face à une situation qui menace notre survie, on produit une réponse de stress très importante qui nous donnera l’énergie nécessaire pour combattre ou fuir cette situation. À l’inverse, le stress relatif survient lorsqu’on fait face à une situation qui comporte l’une ou plusieurs des quatre caractéristiques suivantes :

 

-Contrôle faible

-Imprévisibilité

-Nouveauté

-Égo menacé

 

Pour vous aider à vous rappeler de ces quatre caractéristiques, vous pouvez utiliser la phrase suivante : ‘Le stress, c’est du CINÉ’ : Contrôle faible, Imprévisibilité, Nouveauté, Égo menacé.

 

Chaque fois que vous faites face à une situation qui comporte l’une ou plusieurs de ces quatre caractéristiques, vous produisez une réponse de stress similaire à celle que vous produisez devant un stress absolu, c’est-à-dire que vous sécrétez des hormones de stress qui vont par la suite accéder à votre cerveau et modifier la manière dont vous interprétez la situation.

 

Le coronavirus qui se répand rapidement dans la population mondiale commence à ressembler à un stress absolu (pensons à l’Italie par exemple).  Par contre, la réponse de stress que j’ai vécue l’autre soir parce que je perdais au Scrabble et que mon égo s’en trouvait menacé est clairement un stress relatif.

 

Mais stress absolu ou stress relatif, le cerveau réagit en général de la même façon en produisant des hormones de stress qui peuvent mener aux manifestations physiques et mentales que j’ai décrites dans mon billet de blogue #4 intitulé : COVID-19 : Dix signes qu’on est stressé(e).

 

Debout sous le jet de la douche chaude que je laissais couler sur mon égo menacé par mes échecs répétés au Scrabble, j’ai laissé le temps à mes hormones de stress de diminuer.  Je savais pertinemment bien que tant et aussi longtemps que ma réponse de stress demeurerait élevée, ma capacité à penser clairement s’est trouverait réduite.

 

Après plusieurs minutes, j’ai senti que l’air passait mieux dans mes poumons et que mes poings se relâchaient.  Mes pensées redevenaient plus claires.  Ma réponse de stress étant sous contrôle, mes pensées pouvaient reprendre normalement leur cours.

 

Et je me suis alors souvenu des enseignements de mon mentor Dr. Bruce McEwen, l’un des plus grands chercheurs au monde dans la science du stress avec qui j’ai eu la chance d’étudier lors de mes études post-doctorales à l’Université Rockefeller à New York.  Bruce disait souvent que l’une des meilleures manières de diminuer un stress absolu ou relatif est d’accepter de s’adapter à la situation en cours.

 

On se rappellera que la réponse de stress existe pour assurer notre survie.  Mais qu’est-ce que cela veut dire ‘assurer notre survie’?  En termes simples, cela veut dire ‘s’adapter’.  Dans l’histoire de l’humanité, ce sont les individus qui ont été aptes ou qui ont accepté de s’adapter aux situations stressantes en cours qui ont survécu.

 

Vous faites partie de la tribu des Covi-Dèqhs au temps de la préhistoire.  Depuis des lunes, vous chassez le mammouth sur les terres sacrées dans le pré à l’est de la quatrième montagne au nord de la vallée des oiseaux à longs becs.  Mais voilà, depuis maintenant dix lunes, vous revenez bredouille.   Vous ne trouvez aucune trace de mammouths dans le pré.  A-Dapth, le sorcier du clan, propose de modifier le parcours de chasse pour l’étendre plus au nord, où croit-il les mammouths ont pu migrer.  Mais Tèthu, le chef du clan, refuse obstinément de modifier le terrain de chasse.  ‘Cela fait des lunes qu’on chasse le mammouth dans le pré à l’est et je ne vois pas pourquoi on changerait nos habitudes ancestrales!’.   Une minorité grogne mais la majorité de la tribu choisit de suivre Tèthu.  Toutefois, après quelques lunes à chasser des terres stériles, le clan s’en trouve décimé, la famine et la maladie s’installent, entraînant avec elles la mortalité et décimant le clan des Covi-Dèqhs.  A-Dapth, qui a quitté le clan depuis longtemps avec sa famille et quelques fidèles pour aller chasser plus au nord, se porte très bien car le pré au nord regorge de mammouths à chasser.  C’est parce qu’ils ont choisi de s’adapter à la situation stressante (absence de mammouths dans le pré à l’est) en modifiant leurs habitudes (on va aller chasser plus au nord) qu’Ad-Dapth et son clan ont survécu.

 

Revenons en mars 2020.  Nous faisons face à la pandémie de COVID-19 qu’on pourrait qualifier de stress absolu.  En plus de ce stress absolu, nous devons accepter de nous confiner à la maison avec les membres de notre famille dans le but d’endiguer ou à tout le moins ralentir la propagation du virus dans la population.  À chaque jour de notre confinement, nous faisons face à une panoplie de stress relatifs qui nous font produire des réponses de stress qui s’ajoutent au stress absolu de la pandémie.  Ceci survient parce que par la force des choses, les situations qui prévalaient dans nos maisons ne sont plus les mêmes.  On doit maintenant travailler à partir de la maison pendant que les enfants sont bien plantés devant nous à nous demander aux 15 minutes si on veut jouer au Monopoly.  On ne peut plus prendre un long bain le soir venu pour se détendre car on a quatre personnes qui font le guet devant la porte de la salle de bain pour faire leurs ablutions.

 

Rien n’est plus comme avant.  Et tout est là.

 

Si on veut diminuer nos réponses de stress devant cette situation insolite, on doit accepter de s’adapter à la situation.  On doit accepter de modifier nos habitudes et ce, sans se taper une colère de bassinette à chaque fois.

 

Si vous exigez le silence absolu car vous persistez à tenter de faire du télétravail à la maison comme vous le faisiez auparavant lorsque les enfants étaient à l’école, vous allez avoir très mal au ventre de stress !  Si vous persistez à garder la maison aussi propre qu’elle l’était auparavant quand tout le monde quittait la demeure à 7h00 pour aller vaquer à leurs occupations, vous allez avoir très mal au ventre de stress !

 

Il faut tenter de vous adapter à la situation.  Le télétravail ne se fera plus de la même manière qu’auparavant et vous devrez trouver de nouvelles façons de terminer ce dossier important tout en ayant Sandrine, Noah et Francis qui vous demandent de jouer à cache-cache dans le sous-sol.  Vous devrez accepter d’enjamber 245 jouets dans le salon quand vous allez à la salle de lavage faire une brassée.  N’ayez crainte, vous serez capable de trouver des solutions pour vous adapter.  C’est parce que vos ancêtres de la préhistoire ont été aptes à s’adapter aux situations stressantes que vous êtes ici maintenant à lire ce billet de blogue.

 

Et lorsque vous mettrez en place de nouvelles stratégies pour vous adapter à la situation, il se peut que ces méthodes ne fonctionnent pas du premier coup.  Vous devrez donc vous adapter encore une fois à cet échec et continuer à modifier votre façon de faire pour trouver la meilleure manière de vous adapter.

 

Depuis que je me suis souvenu des sages paroles de mon mentor Bruce McEwen l’autre soir dans la douche, je passe mon temps à dire aux membres de ma maisonnée ‘On s’adapte ! On s’adapte !’  On ne peut plus faire X, alors on tente Y.  On réalise qu’Y ne fonctionne pas, on essaie Z !’ (et je ne parle plus de Scrabble ici! :).  Et j’ai moins mal au ventre de stress depuis deux jours.  J’ai même accepté de perdre au Scrabble contre fiston car vraiment, ce mec est plus fort que moi à ce jeu !

 

Alors en ce beau dimanche printanier, je vous propose de commencer à vous pratiquer à vous adapter aux situations en cours dans votre maison.  Et si vous trouvez des manières hyper-efficaces de vous adapter au confinement à la maison, n’hésitez pas à les partager avec tout le monde sur cette page Facebook !  Car c’est ensemble qu’on s’adapte le plus rapidement et le plus facilement :).

 

Texte de Sonia Lupien PhD., Directrice du Centre d’études sur le stress humain