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The Centre for Studies on Human Stress (CSHS) is dedicated to improving the physical and mental health of Canadians by empowering individuals with scientifically grounded information on the effects of stress on the brain and body.
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Le stress chez vos jeunes

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Le stress chez vos jeunes

LE STRESS CHEZ LES ENFANTS : MYTHE OU REALITE?

Sonia Lupien, Ph.D.

Marie a 3 ans. Ses parents se sont séparés l’an dernier mais demeurent en bons termes. Marie vit une semaine chez son père, et une semaine chez sa mère. Elle fréquente une garderie cinq jours par semaine et chaque vendredi, elle quitte la garderie avec son petit sac de voyage sous le bras, compte tenu que son ‘début de semaine de garde’ chez papa ou maman a lieu tous les vendredis. De toute évidence, Marie est une enfant occupée et peut-être même un peu bousculée. Mais cela veut-il nécessairement dire que Marie est stressée?

La plupart d’entre nous aurions tendance à répondre à cette question par l’affirmative, et cette réponse s’explique en majeure partie par l’idée que nous avons du stress. La majorité des gens voient le stress comme étant le résultat de la pression du temps. Nous serions donc stressés lorsque nous n’avons pas le temps de faire toutes les choses que nous voudrions faire dans un laps de temps donné, ou lorsque nous nous sentons pressés par le temps. Dans ce cas, Marie pourrait être une enfant stressée car elle est constamment pressée par le temps, courant de chez papa à maman, et se dépêchant tous les matins pour aller à la garderie. Voilà pour le mythe. Qu’en est-il de la réalité?

Des recherches scientifiques effectuées depuis les 30 dernières années ont démontré que la définition du stress comme étant la pression du temps est erronnée, et qu’elle peut mener à de fausses interprétations quant aux conditions pouvant mener au stress et par extension, aux façons de gérer le stress dans la vie de nos enfants. Les chercheurs ont découvert que la pression du temps n’est en fait qu’une conséquence du stress, et non une cause. En fait, pour qu’une situation soit stressante, elle doit comporter au moins l’une des trois conditions suivantes : elle doit être nouvelle, imprévisible et de manière plus importante, la personne doit avoir l’impression qu’elle n’a pas le contrôle sur la situation. Ainsi, la pression du temps n’est que la conséquence d’une perte de contrôle sur le temps, et ne définit pas le stress tel quel.

Nouveauté, imprévisibilité, et absence de contrôle sur une situation. Voilà la recette parfaite pour une situation stressante. Compte tenu de cette définition du stress, il est clair que les enfants sont plus vulnérables au stress que les adultes, puisqu’ils ne possèdent bien souvent pas la capacité de contrôler les situations dans le but de diminuer la nouveauté et l’imprévisibilité. La gestion du stress chez les enfants passera donc nécessairement par un contrôle parental. Plusieurs études ont démontré que lorsque les parents agissent de manière à diminuer la nouveauté et l’imprévisibilité chez leurs enfants, ils peuvent augmenter le sens du contrôle chez ce dernier, et par extension diminuer son stress.

Lorsque les parents de Marie se sont séparés, ce fut par la force des choses une situation extrêmement stressante car elle était nouvelle, imprévue, et l’enfant avait sûrement l’impression de n’avoir aucun contrôle sur la situation. Toutefois, si les parents de Marie ont su établir une relation sans guerres de tranchée personnelles, s’ils ont graduellement exposé Marie au nouvel appartement de papa ou maman, et s’ils ont laissé une certaine latitude de décision à Marie quant à la fréquence des visites à l’un ou l’autre parent, ils ont contribué à diminuer cette réponse initiale de stress. Il est donc tout à fait possible qu’aujourd’hui, Marie ne soit pas une enfant stressée et qu’elle se développe aussi bien qu’un autre enfant n’ayant pas été bousculé par des événements familiaux.

Nous sommes des milliers de familles québécoises à amener nos enfants chaque matin à la garderie, courant bien souvent pour ne pas être en retard au travail. Nous laissons nos enfants dans des endroits remplis de bruits et de cris pour ne les reprendre que 8 à 10 heures plus tard. Contribuons-nous encore une fois à stresser nos enfants? Des études récentes ont démontré que non, et que la clé du succès résidait dans les éducateurs et éducatrices qui s’occupent de nos enfants. On a découvert qu’une éducatrice sensible et à l’écoute des besoins des enfants contribuait significativement à diminuer la sécrétion des hormones répondant au stress.

Encore une fois, ce sont les comportements des adultes (éducateurs dans ce cas) qui aident l’enfant à gérer la nouveauté, l’imprévisibilité, et à augmenter son sens du contrôle. Beaucoup d’éducateurs vous diront que les lundis sont plus difficiles que les mercredis à la garderie. Chaque lundi de la vie d’un jeune enfant représente une nouvelle transition d’un week-end passé à la maison à la garderie le lundi matin, ce qui augmente l’imprévisibilité et diminue le sens du contrôle. Ainsi, dans les garderies, il est extrêmement important qu’il y ait une stabilité au niveau du personnel pour que l’enfant soit assuré que la transition de la maison à la garderie n’est pas un chemin parsemé de nouveauté et d’imprévisibilité.

Ce qui ressort de la majorité des études mesurant le stress chez les enfants est que les parents sont les acteurs les plus importants pour gérer le stress de leur progéniture.

Toutefois, ils peuvent aussi être une source importante de stress pour leur enfant. Il y a quelques années, j’ai effectué une étude dans laquelle j’ai démontré que les enfants exposés à la pauvreté sécrètent plus d’hormones de stress que les enfants de milieux socioéconomiques aisés. Nous avons aussi montré que lorsque la mère présente des symptômes de dépression, son enfant réagit en sécrétant des taux anormalement élevés d’hormones de stress. Dans les deux études, le lien entre l’environnement familial et le stress chez les enfants n’était présent que chez les jeunes enfants de 6 à 10 ans, et disparaissait chez les adolescents de 12 à 16 ans. Il est clairement établi que lors de l’adolescence, l’importance de la famille diminue au profit de l’importance accordée aux amis et aux pairs. De plus, en vieillissant, l’enfant développe les capacités cognitives lui permettant d’établir un meilleur contrôle sur son environnement. Il est donc possible que l’enfant exposé à un environnement familial stressant bénéficie, à l’adolescence, de cette diminution de l’influence familiale, ce qui pourrait en fait contribuer à diminuer son stress.

Ce qu’il est important de retenir quant à la présence ou non de stress chez nos enfants, c’est que le stress est relatif. Sa présence dépend d’une multitude de facteurs provenant de l’environnement familial, de l’âge et la personnalité de l’enfant, et de son environnement social. Toutefois, la seule chose qui ne change pas avec le stress, ce sont ses causes : la nouveauté, l’imprévisibilité, et l’absence de contrôle. Travailler sur ces trois composantes, c’est assurer à soi-même et à sa famille une saine harmonie.